UN PRECURSEUR DECOUVRE LES PC ET LES PUCES

En 1954, des scientifiques de la compagnie Rand que dirigeait le professeur Mick Tanner, tentèrent d'imaginer à quoi pourrait ressembler un ordinateur personnel (personal computer, en abrégé : PC) à l'horizon 2004. Bien que ne disposant que de la technologie de l'époque, ils parvinrent au prototype ci-dessus. On distingue en arrière plan l'unité centrale, en haut à droite le moniteur, et au premier plan le clavier avec son imprimante incorporée. Ce modèle quoiqu'un peu encombrant (mais il tiendrait dans un duplex ministériel) et bien trop onéreux (sauf peut-être pour un ministère de l'Économie), fonctionnait parfaitement en langage FORTRAN et le courriel s'échangeait via une télétype. Conscients que les ventes ne seraient jamais fastes, les ingénieurs de la Rand renoncèrent à ce projet, mais conservèrent le concept dans leurs cartons dans l'attente de nouvelles technologies. On connaît la suite. Décédé en 1972, le professeur Mick Tanner n'aura pas connu le fantastique succès de son idée. Mais nous avons retrouvé grâce à Internet un de ses stagiaires de l'époque, qui a accepté d'évoquer quelques souvenirs. Timide et discret, il nous a demandé l'anonymat. Nous ne le désignons donc que par ses initiales : B. G. Il s'est exprimé dans un français d'une grande pureté, riche d'un impressionnant et, parfois, fort familier vocabulaire. Extraits.

Nous étions une bande d'ingénieurs matheux parlant de tout ce qu'on claquait dans les racks, et de FORTRAN qui nous mettait dans le bain. Nous traversions des périodes de doutes imprécis : est-ce sensé, calculer ? Nos chiffres n'étaient pas beaux et, malgré nos calculs, nous nous retrouvions souvent en butée. Nous étions parfois comme de jeunes chiots voulant, devant les sottes, briller en astiquant nos manettes. Nos goûts douteux nous menaient aux bogues et à de brûlants débats sans souci des échéances. En quête d'un ampli pour sa boîte, le Vieux, conciliant, nous criait : « Branchez vite ! Pas besoin d'être calé pour brancher ! Déballez vos fiches sans temps mort ! Attention, tu tords cette infortunée prise en enfichant mal le culot ! » Il nous expliquait : « Vous verrez ceci si je branche cela. Mais ça va être faux si vous appuyez sur cette touche. » On bâillait pendant les saisies, et, les bons jours, on arrivait à voir le quart des données, pourvu que le prof nous laisse le fichier. Il nous encourageait : « Quels superbes chiffres, vous en êtes brillants ! Regardez comment cet incroyable Pete excite les « bip » et comment cette thésarde joue avec son Q. I. ! » Alors vint l'ère des puces, au début fort piteuses. Le professeur avait prévu beaucoup de puces, mais pour les déclencher, il fallait préalablement frotter le laiton (quand le laiton était détectable) et l'étain des puces. En cas d'insuccès, le prof grommelait : « Qu'est-ce qu'elle fait, cette puce ?! » Puis arrivèrent les fibres, au début souvent bouchées. Mais bientôt, nos fibres suscitèrent plein d'enchantements. Nous rêvions d'un temps où l'on pourrait s'envoyer des vélins par image. Nous nous confiions : « Nos nuits parachutent nos rêves ». Quelles nuits paisibles ! Nos rêves sont devenus réalité. Prenant des fibres de choix, nos belles stagiaires découvrent nos sites et les BUS. Envers de la médaille, des hackers blonds cliquant cyniquement s'abattent sur des consoles de façon hérétique. Qu'importe : à présent, c'est moi le « Vieux » et mes jeunes m'appellent : « Super PC ».

B. G. nous a quittés en nous embrassant...

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